Combat

Parfois, j’ai l’impression que nous, vignerons indépendants, vignerons artisans, menons un combat qui va bien au-delà de l’élaboration des meilleurs vins possibles. Un combat contre un monde conduisant, inexorablement, vers plus de concentration : des entreprises toujours plus grosses, toujours plus efficaces, toujours plus rentables.

J’ai décidé de reprendre le domaine familial en lisant le texte de Jean GIONO :

« Lettre aux paysans sur la pauvreté et la paix. »

Drôle de titre pour choisir son métier alors qu’aujourd’hui tant de jeunes ne rêvent que d’être youtubeurs pour gagner le maximum d’argent dans le minimum de temps…

Mais, qu’on ne s’y trompe pas ! Je ne veux surtout pas opposer les époques ou les rêves de chacun, ni me positionner dans le camp du bien contre le méchant monde moderne amoral… Je crains juste que cette société où individualisme et matérialisme règnent en maîtres mène plus difficilement au bonheur que celle des décennies précédentes…

Car c’est de bonheur dont il s’agit… Et mon métier est capable d’emmener vers des bonheurs simples. Simples mais extraordinaires !

Tout d’abord car il permet la contemplation. La contemplation de la nature, toujours changeante, toujours renouvelée. Ensuite car il permet l’émerveillement : Emerveillement devant les premiers bourgeons de vignes qui, chaque année, éclatent et nous font la promesse d’une nouvelle récolte. Emerveillement devant la transformation magique de raisins en un liquide translucide aux reflets dorés ou violacés capable de traverser les années… Ce vin qui est l’aboutissement de décennies de travail, à la vigne à la cave… L’aboutissement de milliers d’heures de réflexions, de soucis et de joie partagées.

Car prendre soin d’un domaine viticole c’est, avant tout, aimer partager. Aimer les rencontres, les moments de fête et de confidences. Aimer transmettre et aimer recevoir.

Aimer s’effacer devant la nature.

Alors oui, c’est une sorte de combat que nous sommes quelques-uns à mener pour que perdure une certaine idée de la paysannerie. Sans refuser le progrès, mais en gardant toujours à l’esprit ce pourquoi nous avons choisi le travail de la vigne.

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